Dans les paysages vallonnés et tranquilles de notre beau département, une révolution culturelle silencieuse s’est mise en marche depuis plusieurs années. Elle ne fait pas de bruit, mais elle touche des centaines de jeunes lecteurs à travers tout le département. Son nom : MangasGers. Avec 10 000 mangas disponibles, plus de 700 séries complètes et un réseau de plus de 50 établissements partenaires, ce projet n’a rien d’anecdotique. Il incarne une aventure collective ambitieuse, à la croisée de la passion pour la bande dessinée japonaise et de l’engagement pour la lecture publique en milieu rural.
Une initiative née d’un enthousiasme partagé
À l’origine de MangasGers, il y a une intuition : celle que le manga peut être un vecteur d’intérêt fort pour les jeunes, mais aussi un levier pédagogique, culturel et social. En 2017, un petit groupe de professionnels de la lecture et de l’enseignement – bibliothécaires, documentalistes et enseignants – s’unit autour de cette idée. Issus de structures diverses comme les médiathèques de Pavie et Riscle, le collège du Val d’Adour, les lycées agricoles de Beaulieu-Lavacant et de Riscle, et la Médiathèque départementale du Gers, ces pionniers partagent une conviction commune : il est temps de proposer “plus et mieux” en matière de lecture publique, en s’appuyant sur les codes culturels des nouvelles générations.
C’est ainsi que naît MangasGers, avec pour objectif de mutualiser les ressources, d’élargir l’offre de lecture et de créer un réseau dynamique entre établissements scolaires et structures culturelles. Un projet porté depuis le début par la Médiathèque départementale du Gers, qui en assure aujourd’hui encore la coordination et l’animation. « Nous étions six structures au départ. Aujourd’hui, MangasGers fédère 21 collèges, 9 lycées et 22 médiathèques », explique Jean-François Thomas, bibliothécaire référent à la Médiathèque départementale du Gers et cofondateur du projet. Ce développement spectaculaire repose sur un modèle de fonctionnement simple, mais terriblement efficace : la mutualisation du fonds manga et sa circulation entre les structures via une navette dédiée. Ce fonds itinérant de 10 000 mangas est constitué de plus de 700 séries, soigneusement sélectionnées pour couvrir une diversité de genres et de styles, du shōnen au seinen, en passant par le shōjo, l’isekai, ou encore le manga historique ou documentaire. Chaque structure peut emprunter des séries selon ses besoins et organiser des activités autour des œuvres mises à disposition.
Au-delà de la lecture, c'est une immersion dans la culture japonaise qui surgit
MangasGers ne se limite pas à la mise à disposition de mangas. Le cœur du projet réside dans les animations et actions de médiation culturelle qui l’accompagnent. Tout au long de l’année, des ateliers de dessin avec des mangakas professionnels, des rencontres d’auteurs, des expositions, des projections, des jeux et des temps forts culturels sont organisés dans les établissements participants. Ces moments permettent aux jeunes lecteurs de découvrir l’univers du manga au-delà des pages, de comprendre les codes graphiques et narratifs, mais aussi d’explorer la richesse de la culture japonaise dans son ensemble. L’aspect interdisciplinaire est encouragé : certains établissements croisent les mangas avec l’histoire, la géographie, les arts plastiques ou encore l’éducation aux médias.
Dans un département rural comme le notre, où l’accès à une offre culturelle dense n’est pas toujours garanti, MangasGers représente bien plus qu’un simple projet autour du manga. Il s’agit d’un exemple concret de coopération territoriale, où les synergies entre établissements scolaires, médiathèques et institutions publiques donnent naissance à un modèle d’accès équitable à la culture.
L’expérience prouve qu’il est possible, même loin des grands centres urbains, de développer des projets innovants, inclusifs et fédérateurs, en s’appuyant sur les ressources locales, la mutualisation et la passion des acteurs de terrain. MangasGers attire aujourd’hui l’attention d’autres départements, qui voient dans cette initiative une manière exemplaire d’animer leur territoire autour de la lecture et de la culture populaire. À l’heure où les politiques de lecture publique cherchent à se renouveler et à mieux toucher les jeunes publics, ce projet démontre que le manga, loin d’être un simple divertissement, peut devenir un outil puissant d’émancipation, de connaissance et de lien social. Et dans cette aventure collective, le Gers s’impose comme une référence nationale, prouvant que l’innovation culturelle peut naître partout… y compris dans les campagnes.
Pour en savoir plus : https://bit.ly/Mangasgers.