Chauve-souris mon amour

Capture d’écran 2021-08-29 204106.jpg

Un reportage de Pierre Foret

«  Bientôt un "renard volant" dans nos vallons ?...Suspendue dans un palmier de "Carpentier ‘ au-dessus d’une forêt de baies, cette " roussette " australienne -  Pteropus poliocephalus  de son nom latin - reste ( pour l’instant ) tropicale. (photo prise lors d'un séjour en Australie) "

Pierre Foret, notre ornithologue de Bezolles, s'est rendu vendredi soir à la nuit des chauves-souris à Montréal et est revenu avec un reportage qu'il nous livre ci-dessous.

Merci à lui !

" Attiré par le noir et ses mystères, timide, je décide de me rendre à la 25 ème "nuit internationale de la chauve-souris" du côté de Montreal…Dans le Gers canadien.

Je consulte brièvement la météo sur radio d’Artagnan qui m’annonce une soirée douce avec un bon taux d’hygrométrie et un mercure de saison pour ce printemps précoce euh…cette fin d’été je veux dire !

Sans trop me l’imposer, je souhaite être surpris et évite le programme.

Après avoir tout de même prévu ma lampe torche et une paire de randonnée, j’emballe un casse-croûte maison ( quelques noix de Cajou suivi d’un pain bagnat ceinturant deux filets de harengs ).

Arrivé en fin d’après-midi sur la place royale de Montréal, je me dirige à la Mairie lieu du premier rendez-vous officiel avec les chiroptères.

L’accueil chaleureux dans la lumineuse salle des Cornières me réconforte.

L’hôtesse, accompagnée de Laurent Jardinet, technicien départemental à l’ESN ( Espace Sensible Naturel), valide avec succès mon pass sanitaire version papier. C’est une première. Je suis ému.

Un groupe d’une trentaine d’enthousiastes sont déjà en place parmi lesquels la dynamique maire de Cazeneuve Martine Laborde.

Puis c’est au tour de Sophie Bareille, responsable de projets au Conservatoire Naturel d’Occitanie, d’orchestrer avec brio une conférence/diapo sur cette curiosité.

Sophie Bareille en compagnie d’une chauve-souris "bouldogue"  ou Barbastelle

Après avoir noté que les pieds de la chauve-souris ont une rotation de 180 ° par rapport aux miens, je peux maintenant mieux comprendre son accroche aisée sur les parois. Notamment celle du tunnel de Pomiro  sur l’ancienne ligne de chemin de fer Condom-Eauze du début du XIXème . Il s’agit d’un site protégé et sous haute surveillance au niveau régional, et national. Classé ENS ( Espace Naturel Sensible ) il reste aujourd’hui la propriété du département .

Une voie verte est en cours de restauration afin de contourner un tunnel "biologique" et patrimonial qui ressemble plus de nos jours à un gîte de chauve-souris !

Puis Sophie, de sa voix claire et limpide, nous informe que ce site est le plus important du Gers avec une population hivernale imposante : 250 rinolphes accompagnées de 400 Minioptères de Schreibers sans oublier les 400 Grands murins et la plus petite de toutes les chauves-souris d’Europe, notre chère "pipistrelle" : un poids de 5 grs pour la taille d’un pouce !…Chaud dans le dortoir !

Pourquoi une telle population sur un lieu précis ?

Sophie Bareille explique qu'il y a un manque flagrant de réseau bocager dans le Gers et les boisements sont de petites tailles. Heureusement qu’un groupe de bénévoles assure les prospections et le suivi des gîtes.

Après avoir confirmé que la chauve-souris made in France est insectivore ( oui le mythe Dracula reste un film ) et qu’elle se nourrit de papillons nocturnes, phryganes ou autres coléoptères, Sophie attire notre attention sur le lien biologique afin de l’attirer dans son jardin : «  il suffit de planter une variété d’essences végétales naturelles qui fleurissent la nuit telles que le chèvrefeuille, l’onagre ou tout simplement «  la belle de nuit « ! Ou encore de privilégier un arbre mort avec ses fissures et cavités.

Un membre de la famille des vespertilionidés, celle qui trouve refuge sous nos tuiles ou derrière les volets 

Puis dans une ambiance animée, Sophie Bareille nous parle du système de reproduction unique de ces merveilles :

« Déjà l’accouplement se fait "à la rentrée" en septembre, pour une ovulation retardée et une gestation de 6 mois ! Puis la femelle donne naissance à un seul petit en avril et…pour l’année !

Comme les cétacés, la chauve-souris se déplace, communique et se nourrit avec un Sonar et donc émet un  ou des systèmes d’ondes.

Mais je n’en peux plus d’attendre et veut communiquer avec elles ! Le groupe se dirige alors en direction du tunnel.

L’appel irrésistible des ténèbres …

Après un couloir vert fait de charmes, de chênes et d’érables champêtres, nous arrivons au pied du site magique .

Sans tarder, les premières "éclaireuses"  sortent du tunnel et nous accueillent.

Puis c’est un ballet de cris et de chuchotements qui planent au-dessus de nos têtes (avec ma calvitie je reste serein ...)

Sophie utilise un détecteur de sons qui capte les ultra-sons et donne ainsi la fréquence de l’ultra-son que l’on entend.

Et selon la courbe des fréquences on peut ainsi identifier l’espèce selon les variantes d’ondes. Travail minutieux sur un logiciel. Sans garantie de précision parfois !

Sophie et son détecteur d’ondes

La cheffe de projet au Conservatoire Naturel d’Occitanie nous chuchote que certaines espèces peuvent identifier une zone de nutrition, par exemple un simple cèdre, à plus de 40 km aller avant de retourner au "tunnel dortoir".

Parmi le groupe, je rencontre Robert et lui demande pourquoi la chauve-souris a encore mauvaise presse de nos jours .

"Et pourquoi s’accroche-t-elle dans les cheveux ? ", me dit-il.  Après un temps de réflexion, Robert m’apporte la réponse : "Pour empêcher les jeunes filles de sortir le soir ! Arrêtons avec les légendes d’un autre temps",  résume-t-il.

René m’indique qu’étant grégaire, la chauve-souris a soulevé des soupçons de transmission du Covid en cette période de pandémie mais on sait qu’aujourd’hui il n’en est rien. Il poursuit en m’expliquant que la connaissance de la flore et de la faune nous incitent à de meilleures habitudes possibles vis-à-vis de ce mammifère.

Le fan-club de cette 25 ème nuit internationale de la chauve-souris

  Sophie Bareille et Laurent Jardinet

En quittant le tunnel, j’ai essuyé un rire ( chuchoté ) de l’assistance après avoir demandé à Sophie si je pouvais prétendre être un descendant de la chauve-souris. Après qu'elle m'ait répondu par la positive, mon retour à la maison fut paisible...

Texte et photos : Pierre Foret

Publicité
Suggestion d'articles
Suggestion d'articles