Au temps des cartes de vœux...

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Le 1er janvier à minuit, vous avez envoyé des textos groupés pour souhaiter la bonne année à votre famille, à vos amis réels ou virtuels... et ceux-ci vous ont répondu – ou pas – par la même voie.

Evoquer les cartes de vœux "papier" vous fait sourire, c'était en effet « le temps d'avant »...

Chez moi, cette période-là était un moment sacré, on envoyait en effet une trentaine de cartes de vœux.

Dans mon village, il était une petite épicerie polyvalente où l'on vendait de tout, du sucre à la morue salée pendue au plafond en passant par la petite papeterie dont les cartes de vœux !

En fin d'année, quand l'épicière aidait la boulangère, elle était tenue par Gaston.

Gaston avait de l'or dans les mains et savait tout faire.

Une bicyclette était en panne, il la réparait comme il réparait des casseroles, je l'ai même vu réparer une bassine en fer !

Nous allions acheter les cartes en groupe avec d'autres enfants du village.

Quand nous arrivions pour choisir nos cartes, Gaston attrapait un grand classeur qu'il ouvrait sur la table.

« Regardez, nous disait-il, et repérez celles qui vous plaisent mais on ne touche qu'avec les yeux ! »

Les cartes étaient belles en effet, il y en avait même en relief avec des paillettes ! Mais celles-là, on ne pouvait pas les acheter car avant de partir, on nous avait recommandé de ne prendre que des cartes traditionnelles de Nouvel An, c'est-à-dire, les sapins, les enfants dans la neige, des skieurs...

Avec son ongle, Gaston détachait les cartes postales enveloppées dans du papier de soie que nous avions choisies.

Au moment de régler, Gaston ne manquait pas de préciser : « Dites bien à vos parents que les enveloppes sont offertes ! » Et il y avait toujours un petit insolent parmi nous pour demander : « Et les timbres, vous ne les donnez pas ? »

Chacun rentrait chez soi et c'était alors le moment de la rédaction des cartes.

Sur la grande table de la cuisine recouverte de papier journal, ma grand-mère posait le flacon d'encre Waterman, sortait les porte-plumes et le cahier avec la liste des destinataires des cartes.

Elle avait au préalable épluché la liste et barré les noms des personnes décédées et de celles auxquelles on ne parlait plus en raison de quelques fâcheries.

Nous devions alors écrire la formule toute faite dont elle avait préparé le modèle: « A l’occasion de la nouvelle année, nous vous présentons nos vœux les plus sincères de bonheur et de santé. » Il fallait terminer par « bons baisers ».

Elle nous surveillait d'un œil sévère car il ne fallait pas gâcher les précieuses cartes !

La formule classique était destinée aux oncles, tantes, cousins que nous ne connaissions parfois même pas.

Mais pour ceux que nous connaissions bien et qui glissaient parfois dans l’enveloppe de retour de vœux un petit billet, le texte était personnalisé !

« Cher Roger chère Angèle, nous avons appris que vous avez pu enfin acheter le bois qui va vous permettre de bien vous chauffer pendant de nombreuses années.

Nous vous souhaitons une bonne et heureuse année et surtout une bonne santé.

Que Roger ne se fatigue pas trop, qu'il laisse faire le travail aux enfants. Ils sont jeunes et peuvent couper le bois !... »

« Chers Elise et Antoine, vous êtes enfin grands-parents d'un beau petit garçon. Ce petit Joël va faire la joie de la maison.

Nous souhaitons à tous une heureuse année... »

« Chers Germaine et Pierre, nous avons appris que vous êtes installés dans votre nouvelle maison.

Vous avez abandonné la campagne pour les abords de la ville où vous serez plus proches des services.

Nous vous souhaitons beaucoup de bonheur dans votre nouvelle vie... »

Au cousin facteur parti en région parisienne pour un séjour imposé : « Cher Jacques, nous espérons que tu profites de la vie parisienne.

Nous savons que tu seras bientôt de retour. Meilleurs vœux pour cette nouvelle année. »

Au-delà du billet espéré dans l'enveloppe de retour, ces cartes de Nouvel An étaient un lien avec des parents, des amis que l’on ne voyait pas souvent.

Et écrire une carte, c'est prendre du temps pour la personne à qui elle est destinée, du temps que la personne prendra en retour pour la lire et y répondre.

Une tradition peut-être désuète à l'époque des mails et sms mais qui fait de la résistance si l'on en croit les présentoirs dans les librairies qui continuent à proposer les traditionnelles cartes de vœux !

Alors vous avez encore tout le mois de janvier pour surprendre famille et amis en leur présentant vos voeux par carte interposée !

Pierre DUPOUY

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